Des mots reviennent souvent dans les conversations : « chienne », « pute », « tu es en chaleur ». Je joue mon rôle. Je suis tour à tour la chienne en chaleur, la pute soumise. Je décris ce que je leur fais. Je prends le temps de prononcer les mots au sortir de ma bouche. Je me souviens en effet d’une phrase d’Ariane Mouchkine parlant à ses comédiens : « Si vous dites le mot « croustillant », nous devons entendre que cela croustille dans votre bouche ». Lorsque je prononce le mot « sucer », je travaille chaque intonation du mot pour que ma voix suggère une bouche qui descend et remonte lentement le long de leur queue. Ils doivent sentir au même moment où mes mots glissent à leur oreille que ma bouche glisse le long de leur sexe, simplement par ma voix.
C’est une manière pour moi d’être au plus près d’une intimité que je construis avec eux l’espace d’un quart d’heure au téléphone. Me glisser dans leur peau d’homme en est une autre. Je m’imagine à leur place. Au fur et à mesure de ce que je leur raconte, je sens très vite ce dont ils ont envie, d’une femme dominatrice ou soumise, de descriptions détaillées ou de gémissements. Des mots qui les font jouir assez vite : « donne moi ton foutre », « tu as les couilles pleines, je le sens, donne le moi, vide-toi dans moi ». J’aime entendre leur cri quand ils jouissent. Je ne sais si les gémissements des femmes sont très différents d’une femme à l’autre, mais le gémissement de jouissance d’un homme est assez semblable d’un homme à l’autre. J’ai entendu ainsi au fil des appels des centaines de soupirs rauques, de cris courts et presque retenus. Je suis souvent celle qui raccroche en premier. Je termine par les mêmes mots avec une voix très douce. Une règle importante : ne pas rentrer dans le réel, rester la voix incarnant le fantasme.
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