C’est quelques jours après avoir envoyé à Alain cette photo que j’ai eu au téléphone Philippe pour la première fois. Philippe portait le pseudonyme « Médecine 33 ». Je ne me souviens plus des détails du commencement de notre histoire parce que je crois que pour moi cela était devenu une chose banale que de dialoguer sur le net ou de téléphoner à des hommes pour les faire jouir ou jouir avec eux. Je jouissais rarement avec eux d’ailleurs. Je ne me caressais que rarement avec eux. Je jouais simplement la passeuse. Une passeuse de jouissance. Une voix de fantasme, des mots réels dans un corps non incarné. Un film ou un magazine pornographique sans images.
Durant cette période qui s'est étalée sur deux ans, d'autres hommes ont été en communication au téléphone rose avec moi. Je n'ai jamais été rémunérée pour écouter ces hommes ou les faire jouir. J'ai été hôtesse au téléphone rose pour mon propre compte, un compte gratuit, pour mon propre plaisir. C'était tout à la fois le plaisir de la jouissance de l’autre et le plaisir pris à exercer une forme de pouvoir avec ma voix. Il n'y avait pas d'enjeu, pas de règlement de comptes sous-jacent avec la gent masculine. Le téléphone rose participait d'un nouveau jeu érotique. « Se fier à une voix, c'est parfois comme suivre une femme dont on a vu que le dos », a écrit Francis Dannemark.
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