Tuesday, July 31, 2012

Entracte

Feuilleton suspendu... Ann Aroïs souffrante... Patience... Merci...

Saturday, July 14, 2012

Au fond du jardin (partie 12)


Je connaissais l’Abbaye des Vaux de Cernay, lieu majestueux au cœur de la forêt de Rambouillet.
Je donnais à Philippe mon accord pour cette rencontre le jour dit. Je ne me lassais pas de regarder ce bouquet.
Les courriels de Philippe suggéraient son goût pour la symbolique des fleurs. Mon dictionnaire des symboles indiquait que l’anthurium rouge était un signe d’invitation à l’amour, de fougue sensuelle. Quant à l’arum rouge, l’offrir signifiait à son destinataire le désir ardent d’une relation d’amour charnel.  L’entrelacement des fleurs dans le bouquet me fit penser que Philippe n’avait pas choisi au hasard ces fleurs et cela me plaisait mais m’angoissait tout autant.
Comment était Philippe ? Etait ce prudent d’aller à ce rendez-vous ? Quelque chose me poussait vers cet homme. J’avais envie de savoir qui se cachait derrière ces mots, ces conseils botaniques, ces allusions, ces messages, ces fleurs.
J’avais envie de cet homme. Sans même le connaître.

Le vendredi, un peu avant 20h, j’entrais dans le parc de l’Abbaye. La vision était éblouissante. Le lac paisible, l’herbe verte, la forêt tout autour,  le pavillon chinois rouge au bord du lac, l’abbaye merveilleuse devenu aujourd’hui un hôtel luxueux.
Je traversais un long couloir de boiseries avant d’entrer dans le grand salon. Près de l’immense cheminée, assis dans un canapé rouge passion, je vis un homme et su tout de suite que c’était lui. A sa façon de me regarder. Il se leva, s’approcha et m’invita à venir s’asseoir. Il était massif, les cheveux blonds, des yeux bleu ciel, une peau matifiée par le soleil. Je remarquais son large sourire, ses mains épaisses. Je réfléchis à l’âge qu’il pouvait avoir. Quarante ans, peut être un peu moins. Peut être un peu plus. Je ne l’avais pas imaginé comme cela.
Je lui trouvais beaucoup de charme. Je lui proposais d’aller boire un verre dehors, sur la terrasse, près des vieilles pierres. Nous parlâmes pendant plusieurs heures. De son métier de botaniste. Il effectuait une mission pour un parc botanique de Bretagne afin de rescencer de nouvelles plantes venues d’autres pays et pouvant s’acclimater au climat breton. Je compris alors pourquoi il m’avait aperçu le jour où j’étais allée chercher mes fleurs. Le parc pour lequel il intervenait était un de ceux que j’avais visité. David travaillait lui aussi pour ce même parc. Il me raconta avoir lu mes écrits et avoir eu envie de créer une rencontre qui soit à la hauteur de celle de Jacob. Nous marchâmes le long de l’abbatiale.
Je lui dis avoir apprécié ses métaphores jardinières. Il me répondit qu’il avait envie de connaître mon jardin secret, le plus intime, de sentir son parfum… J’avais envie de cet homme.
De plus en plus envie. Il n’était pas vraiment beau. Pas vraiment attirant mais j’avais envie de lui. Il me demanda maladroitement si j’avais envie de rester cette nuit avec lui dans une chambre. Je lui dis oui.
Il ne m’embrassa pas.
Nous sommes rentrés dans le hall et avons pris l’ascenseur jusqu’au dernier étage. Il ne parlait pas. Moi non plus. Au fonds du couloir, il ouvrit la porte de la Chambre Rotschild. Une suite donnant sur le parc, avec une fenêtre en œil de bœuf près d’un petit salon art déco. Le lit immense avait été ouvert par la femme de chambre. Les lumières des chevets étaient allumées.
Je posais mon sac. J’aperçus la fresque en mosaïque de la salle de bains, ses boiseries et les deux peignoirs blancs posés près de la fenêtre. Philippe est allé entrouvrir la fenêtre, tira le rideau, ce qui assombrit légèrement la pièce. Il éteigna une des des lampes puis s’approcha de moi. Je le laissais faire. Il se déshabilla devant moi dans le silence. Je ne bougeais pas et le regardais. Il avait un torse carré et massif. Des cuisses larges.
Son sexe était large, déjà dur. J’avais envie de me laisser faire.
Il s’approcha de moi, écarta les épaules de ma robe, sortit mes bras des manches, puis fit glisser ma robe le long de mes cuisses. Il dégrafa mon soutien gorge et baissa doucement la culotte que je portais. Je le laissais faire. Il se colla à moi. Je sentis ses mains autour de ma taille. Il me dit simplement au creux de l’oreille « je veux plonger entre tes cuisses, respirer ton odeur, te sentir, te ressentir ».  Je m’allongeais sur le grand lit, au milieu. Philippe ne m’embrassa pas. Je ne fis rien de cela moi non plus. J’écartais simplement les cuisses et lui dis « viens ».

Wednesday, July 11, 2012

Au fond du jardin (partie 11)


Ann
Actuellement, j’ai une envie irrésistible de promener mon ver dans un ruisseau pour qu'une truite le gobe.
Savez vous que l'on peut lire une rivière, deviner où se cachent les belles. D'une touche électrique, quasi jouissive, certaines avalent goulument l ‘appât, d autres timidement par petits coups. Je prends ma gaule et vais de ce pas vers le ruisseau, vous abandonnant lâchement pour mon plaisir.
J'aurai plus de temps à vous consacrer dans une semaine.
Je dois partir à Courson en vue de la préparation de la journée des plantes.
Philippe


Philippe,
Je dois partir quelques jours à Paris pour mon travail. Je vous attends donc à mon retour.
Ann

Un homme frappa à ma porte le lendemain matin. C’était un livreur, il apporta un bouquet d’anthuriums rouges et d’arums rouges entrelacés de feuillages abondants verts.
Une carte accompagnait le bouquet.
« Lady,
Si ce n’est en Bretagne, voyons nous ailleurs… Nous ne serons pas si loin… Abbaye des Vaux de Cernay – vendredi - 20h dans le Grand Salon –  Voulez vous ?
 Votre jardinier
Philippe ».

Tuesday, July 10, 2012

Au fond du jardin (partie 10)


Philippe,
A vous lire, c’est une digitale rouge qu’il me faudrait vous offrir. N’est ce pas la fleur qui crie le désir charnel ardent ? 
Ou peut être un iris ? car vous enchantez mes jours mais je rêve, je vous avoue, que vous enchantiez mes nuits.
Vous voyez, moi aussi, je jouis du langage des fleurs. Quand viendrez vous donc vous montrer dans mon jardin ?
Ann, qui n’en puis plus de ne pas vous connaître.


Silence à nouveau.


Monsieur,
Je ne sais si votre silence doit m’irriter ou m’émouvoir.
J’ai acheté toutes ces plantes au moment même où vous abandonnez mon jardin  me semble t’il. 
Il me serait bien agréable que vous mettiez à ma disposition David ou un autre jardinier, puisque vous ne daignez pas venir vous même afin de planter comme il faut ces fleurs en pots qui ne demandent qu’à intégrer la terre.
Que dois je comprendre à votre silence ?
Dois je y voir une signification balzacienne ? Allez vous m’envoyer un lys ? Etes vous donc Felix de Vandenesse et moi la Comtesse de Mortsauf ?
Votre Lady, quelque peu impatiente. 


Lady,
Pour mettre la plante en terre, il faut que le trou qui la recevra soit bien humide, n’oubliez pas cela. 
Votre jardinier


Monsieur,
Arrosez, arrosez… pour que cela soit humide…
Votre Lady


Bonsoir Lady,
Durant la nuit, comme l'ouverture de la pêche approche, je vais entreprendre l'inventaire des zones humides.
Si durant votre sommeil vous ressentez des frémissements, ce n'est que moi qui suis en train de passer.
Il est même possible que je vérifie l’humidité en y entrant un doigt, voire ma gaule.
Votre jardinier


Monsieur,
Vous avez un sixième sens, celui de savoir ce qui me plait.
Car en effet, qu'on me réveille la nuit par quelques caresses bien choisies est une chose que j'adore. Il ne faut pas longtemps pour me convaincre d'écarter un peu plus les cuisses.
Pour y laisser entrer un doigt, voire deux.
Et lorsque l’humidité laissera trace sur votre peau, ce qui viendra assez vite sous des doigts d'experts, c'est avec une envie non dissimulée que j'en appellerai à votre queue.
Apprendre les sciences de la nature avec vous, jardinage ou pêche, est un pur délice.
Je ne me suis jamais sentie aussi proche de la nature.
Ann

Monday, July 09, 2012

Au fond du jardin (partie 9)


Ce petit jeu m’excitait tout autant qu’il commençait à m’irriter. Je décidais de prendre les choses en main et d’aller visiter quelques pépinières afin de glaner moi-même quelques plantes et quelques conseils.
Je visitais plusieurs pépinières de la région environnante.
Agapanthes ; plumbagos, géranium vivace rozanne, j'achetais un ensemble de fleurs aux nuances bleues pour donner de la couleur au premier plan de la terrasse.
En vis-à-vis du massif d’hortensias rose et violet, voilà qui me semblait tout à fait bien. La glycine à gauche fleurira d’avril à juin et dialoguera ainsi avec le plumbago en fleurs lui aussi à cette période.

« Lady,
 Vous avez choisi les plantes adéquates mais vous auriez dû prendre un solanum jasminoïde pour faire courir sur le mur de votre maison, tout près de votre terrasse. Le parfum du jasmin, dit on est le parfum des rois. Celui de la rose, le parfum des bien-aimés. Vous étiez ravissante avec votre robe blanche. Et si j’osais, je vous dirais qu’il me plairait de sentir le parfum de votre propre jardin, le plus intime. Les jardins persans étaient toujours ceints de murs pour que l’intimité soit protégée. J’aimerai écarter les murs de la vôtre.
J’aimerai entrer dans le bleu de vos fleurs car entrer dans le bleu, c’est un peu comme Alice au Pays des Merveilles, passer de l’autre côté du miroir. Quand un gentilhomme offrait une clématite bleue à une dame c’est qu’il exprimait son désir, lui disant autrement « j’espère vous toucher ».
Les égyptiens avaient eux aussi le goût des jardins, avec des massifs fleuris et des bassins. Ils en dessinaient sur les murs et sur le sol de leur palais. Chaque fleur avait son langage.
Pardonnez mon audace.
C’est peut être que j’ai trop abusé des baies de mandragore, Pommes du Diable ou Pommes d’Amour, selon les croyances, qui provoquent un sommeil plein de rêves. Des rêves érotiques.
Philippe, votre jardinier »


David n’était donc pas Philippe. Je n’avais vu David dans aucun des endroits où j’étais allée. J’avais visité quatre pépinières, de Saint-Yvi à Combrit, en passant par Fouesnant et Riec-sur-Belon. Impossible de savoir où était Philippe puisque manifestement il m’avait vue.

Sunday, July 08, 2012

Au fond du jardin (partie 8)


Lady,

Avant toute chose, il nous faut faire quelques coupes dans votre allée. J’ai remarqué quelques arbres qu’il est nécessaire d’élaguer. Je vous envoie un de mes assistants qui saura préparer les travaux préliminaires.

Votre jardinier

Le jour suivant, vers neuf heures, un homme jeune, vint se présenter à moi, me disant qu’il était envoyé par mon jardinier. Je n’eus pas besoin de lui indiquer ce qu’il y avait à faire, celui-ci me dit que Philippe lui avait tout expliqué et qu’il souhaitait se mettre au travail tout de suite avant que la chaleur ne soit trop forte. Entendre prononcer son prénom créa un trouble en moi. Je n’avais jusque là eu connaissance que d’un nom et une initiale de prénom dans son adresse électronique.
Je laissais le jeune homme rejoindre le jardin.
Je ne pus m’empêcher de penser que cet homme connaissait Philippe, son visage, son allure, tandis que moi je ne connaissais rien. J’aurai voulu lui poser quelques questions, savoir l'âge de Philippe, mais je n’eus pas le temps. Le bûcheron que m’avait envoyé ce dernier s’était déjà mis à la tâche. Il me dit simplement « je m’appelle David, où dois je mettre le bois que j’aurai coupé ? ». Je lui indiquais un endroit près de la remise.
Depuis le salon, derrière ma table de travail, j’apercevais ce David coupant le bois. Grand, massif, je le voyais couper en deux chaque bûche d’un geste large et sûr. Je ne pouvais m’empêcher de fantasmer. Philippe l’avait il envoyé dans ce but ? je me plaisais à imaginer qu’il en était ainsi.
David ne se déconcentrait pas de son travail. J’imaginais son torse trempé par la sueur contre le mien. Voilà un fantasme bien banal avant de rayer l’écriture de la scène que je fantasmais. Toutefois, je ne pouvais m’empêcher de le regarder. Il était torse nu et son torse me plaisait. Il avait les bras bandés et cela m’excitait. Je me demandais si son sexe était de bonne taille. Je me demandais comment il baisait.
Le bois coupé, il vint me dire au revoir. Il avait des yeux clairs magnifiques. Il refusa à boire.
Quelques  heures après son départ, je ne pus m’empêcher de fantasmer sur lui, allongée sur mon lit, cuisses ouvertes et doigts caressant mon sexe. Je l’imaginais me baisant avec la même assurance qu’il coupait le bois, avec la même force.
Dans la soirée, je reçus un courriel de Philippe.
« David vous a t’il donné toute satisfaction ? »

Je lui répondis qu’il m’avait apporté plus de satisfactions que je n’en attendais. Ce à quoi Philippe me répondit qu’il savait que David était l’homme de la situation et qu’il l’avait choisi en conséquence, qu'il avait une ressemblance avec l'homme des bois de Lady Chatterley. Je me demandais si Philippe choisissait ses mots sans le savoir ou s’il émoustillait avec plaisir et une légère perversité mon appétit charnel.

N’ayant à nouveau pas de nouvelles durant deux jours, j’envoyais un courriel en demandant ce qu’il en était de mon jardin. Pourquoi donc l’avoir laissé en friche après tant de premiers soins ?

Et si ce David n’était autre que Philippe ?

Saturday, July 07, 2012

Au fond du jardin (partie 7)


Madame,
ou plutôt Lady,

Les hommes sont ainsi faits
Ils peuvent être cruels sans le vouloir
Pardonnez moi ce silence
C’est que je travaille beaucoup.

C’est le jardinier qui vous parle,
Qu’en est il de votre pelouse ?
Il me faudrait un état des lieux des travaux à entreprendre
J’adore m’occuper des pelouses
Comment est la vôtre ?
Green anglais ?
Broussaille ?
Prairie scandinave ?
Dites moi tout.

Que je fasse de beaux rêves…

Votre dévoué jardinier



Cher Monsieur,

Je ne saurais décrire ma pelouse…
Pour cela, il vous faudrait venir et que nous nous rencontrions afin que je vous montre comment elle est faite.
Par ailleurs, j’aimerai que vous vous occupiez des monts vallonnés à l’arrière de ma propriété…
Ann Aroïs
Votre Lady


Chère Lady,
Je m’occuperais volontiers de votre arrière.
Pour le moment, je vous propose de nous consacrer au chemin qui mène à votre entrée principale.
J’imagine aisément un magnolia dont la fleur s’ouvre avec délicatesse et dont la beauté éblouira vos invités quand ils pénétreront dans le chemin.
Le magnolia stellata est d’une culture assez facile, aime les sols humifères et donnera à votre entrée des allures de jardin japonais, digne d’une geisha. Mais nous pouvons aussi opter pour un magnolia double diamond, un must have pour tout jardin. Les chinois le cultivent depuis plus de mille ans et en ont fait un symbole de pureté.
Votre jardinier


Cher Monsieur,

Comme tout cela est d’une poésie remarquable.  Le double diamond me convient tout à fait. Quand pouvez vous venir le planter ? J’attends avec impatience que vous vous occupiez de mon jardin. Je n’y tiens plus….

Ann

Friday, July 06, 2012

Au fond du jardin (partie 6)


Madame,
Ce matin, pendant que vous dormiez j’ai fait le tour de ce que vous m'avez confié en garde.
Il faudra m’indiquer quelles sont les plantations à faire. Comment préférez vous les cucurbita pepo?
A quel stade faudra t il que je vous les apporte ?
Jeunes et fraiches ou plus épaisses?
C ‘est sans doute trop classique comme culture pour une femme de votre rang, mais je puis vous assurer que je saurai vous faire juter avec.
Votre jardinier


Monsieur,
Bien que vous soyez à mon service, je dois vous avouer qu'en matière de jardinage, je vous suis totalement soumise.
Prenez donc les choses en main, même si je suis en train d'opérer quelque nettoyage sur le sol.
Au sujet des cucurbita pepo, j'avoue que j'ai une préférence pour la courge à moelle.
Apportez la moi à un stade plutôt épais. J'ai une bouche qui saura l'apprécier. Suffisamment grande si elle était de taille imposante, et suffisamment active s'il fallait la déguster avec ma langue. 
Si la courge était un peu trop molle, j'ai une recette qui dans la bouche la fera vite durcir.
La courge à moelle est souvent bien remplie et son jus me fait saliver d'avance.
Oserais je vous demander comment est la vôtre ?
Ann, votre dévouée apprentie jardinière


Je n’ai reçu aucune nouvelle pendant plusieurs jours. Peut-être avais je été trop loin dans mon courriel. Au fonds, ce silence m’avait permis de réfléchir et je pris la décision de modérer mes propos, de revenir à ma préoccupation première, à savoir mon jardin. M’inquiétant toutefois de ce silence, j'envoyais un nouveau courriel demandant à mon jardinier s’il avait décidé de renoncer à mon chantier.

Thursday, July 05, 2012

Au fond du jardin (partie 5)


Madame,
Demain matin, quand vous vous réveillerez, regardez votre jardin, le voile laiteux qui s'y sera déposé ne sera pas de la rosée.
Ce voile sera le début, je l'espère, d'une juteuse association.
Votre jardinier



 Cher Monsieur,
J’aimerai que mon balcon soit arrosé de cette semence.  Si j’osais, j’ajouterais même qu’il me plairait de caresser celui ci de cette pluie fine. Nous sommes donc faits pour nous entendre.
Arrosez-moi de votre jus autant qu'il vous plaira.
Ann A
.


Cet homme m’excitait et me faisait véritablement fantasmer. Je me plaisais à l’imaginer tout en regrettant de lui avoir répondu de la sorte. Qu’allais je faire dans ce chemin ? Je ne savais ni qui était cet homme, ni s’il était dangereux ou pas.

Wednesday, July 04, 2012

Au fond du jardin (partie 4)


Cet homme inconnu avait percé un secret chez moi bien gardé, un visage sur un nom. Peu de gens savent qui se cache derrière mon pseudonyme et je tiens à garder ce secret. Il tient, pour moi, de ma démarche. Celle du boudoir. Alors que beaucoup de personnes peuvent me lire, j'invite uniquement dans mon boudoir privé celles que je choisis. Voilà que cet homme que je ne connaissais pas savait lui qui j’étais. Voilà qui m’intriguait mais aussi m’inquiétait.

Il répondit à ma photo de l’agave en me parlant de mon balcon. Sur cette photo, j'étais habillée d’une robe légère au décolleté profond.


Madame,
Sachez que je n’ai jamais eu de balcon aussi gros sous ma responsabilité. Toutefois, vous avez fait le bon choix en m'engageant, votre balcon et votre jardin seront entre de bonnes mains.
Votre jardinier

Amusée par l’ambiguité de sa réponse, j’eus envie de lui répondre de la même façon.

Cher Monsieur,
Vous m'en voyez ravie.
J'avais peur que mon balcon vous déplaise. Que vous le trouviez trop imposant.
Ou inintéressant.
Je ne doutais pas de vos compétences.
Vos mains calleuses ne font que me plaire un peu plus.
Et oserais je le dire me font fantasmer en secret.
Que voulez vous... je suis de ces châtelaines qui aiment le travail des hommes de la terre. 
Qui en jouit même.
Ann Aroïs

Tuesday, July 03, 2012

Au fond du jardin (partie 3)


Je reçus un nouveau courriel le soir. Mon jardinier inconnu me dit simplement « J’étais derrière vous. Manoir de Kertalg. » J’étais de plus en plus intriguée. En lisant le mail, je pensais tout de suite au roman de Nicolas Fargue que j’avais lu l’été dernier. «J’étais derrière vous ». Mais je compris aux mots qui suivaient qu’il n’y avait pas d’allusion à ce roman car le nom même du Manoir de Kertalg m’éclaira vite. J’avais passé quelques après-midi là bas au calme du grand parc arboré, avec une amie, devant un thé glacé. Peu de monde, hormis les clients de l’hôtel, venaient dans cet endroit pour y passer un peu de temps l’après-midi. Moi-même, j’avais été informée de cette possibilité par un ami qui y avait séjourné. Mon jardinier était donc un jardinier voyageur, sans doute client de passage de cet hôtel. Il n’était d’ailleurs sans doute pas jardinier. A moins qu’il ne soit comme moi, un habitant saisonnier de la région venant profiter du calme quelques après-midi dans cet endroit retiré dans les bois. Peut être était il paysagiste, travaillant sur les plans d’un nouvel aménagement du parc de l’hôtel.

Il me revint en tête la conversation que j’avais eue un après-midi, assise dans un fauteuil confortable, autour d’une petite table ronde, dans le jardin ensoleillé du Manoir de Kertalg, avec mon amie. Je lui avais fait part de mon souhait de trouver un jardinier au vu de mon incapacité à faire de mon jardin un lieu d’épanouissement pour mes plantes. Je me souvenais alors lui avoir dit de quelle manière j’allais procéder, en passant une petite annonce dans le journal local. Mais comment cet homme savait il que j’écrivais ? Je n’écris que sous un pseudo et je ne me souvenais pas avoir évoqué avec mon amie lors de notre conversation mon nom d’emprunt. Je me souvenais simplement avoir parlé de la correspondance passionnée de Henry Miller et d’Anaïs Nin, dont je venais d’achever la lecture. Nous parlions de nos dernières lectures respectives. Je me souvins alors que mon amie m’avait demandé si Jacob Miller avait choisi ce pseudo en écho à Henry Miller. Je lui dis que oui, qu’il avait longuement cherché un nom d’emprunt lorsque nous avons décidé d’un commun accord de publier en ligne la correspondance érotique que nous entretenions.

J’avais vu juste. Mon jardinier inconnu m’expliqua dans un courriel dès le lendemain qu’il avait simplement tapé les mots « correspondance Jacob Miller » dans un moteur de recherche, ce qui le transporta très vite vers les pages de mes écrits en ligne. Il me dit avoir lu ensuite chaque texte que j’avais écrit.


Je sais que mes textes sont lus. Des lecteurs m’écrivent souvent. Je réponds à chaque demande de correspondance érotique par la négative, souhaitant laisser à celle de Jacob son caractère unique et singulier. Cet homme m’intriguait. Je pensais alors à ce lecteur qui m’avait dit en lisant mes derniers textes que je décrivais sans cesse des hommes qui étaient étranges et inquiétants mais aussi très attirants. Je n’avais pas remarqué cela et qui plus est je n’étais pas d’accord avec ce point de vue.  Au fonds, ce qui m’intéresse chez un homme c’est le plaisir que nous pouvons avoir ensemble, celui qu’il me donne et celui que je donne. Cette intimité qui amène l’un et l’autre à jouir est la véritable intimité. Un partage qui est souvent un leurre. L’orgasme se donne à voir à l’autre mais ne peut pas être complètement partagé. Si la jouissance est donnée par l’autre, elle n’est ressentie profondément que par l’un. J’aime les hommes parce que j’aime percer le secret de leur jouissance, chercher ce qui les fera jouir. J’aime les hommes pour la jouissance qu’ils peuvent me donner. Les hommes que je décris sont le reflet de leur jouissance, mystérieuse quelquefois, prétentieuse, ou impérieuse. J’écris pour conserver la trace de l’intimité que j’ai avec certains hommes.

Monday, July 02, 2012

Au fond du jardin (partie 2)


En panne d’inspiration depuis quelques temps, son entrée dans ma vie arrivait à point nommé pour occuper mes rêves et alimenter mon écriture. L’été n’était-elle pas cette saison où seuls comptent l’insouciance, la légèreté et le plaisir des choses simples ? Dormir sur une chaise longue en rotin, bercée par le souffle léger du vent. Boire un verre de vin blanc frais, le soir venu, à la lueur d’un photophore. Faire l’amour l’après-midi, les volets fermés pour protéger de la chaleur les corps déjà moites de plaisir. Lire quelques romans qu’on lit uniquement en été avec la seule envie d’être transportée.
Je demandais à mon jardinier inconnu si lui-même avait quelque chose de l’homme des bois puisqu’il m’imaginait en Lady Chatterley.

Je lui envoyais la photo d’une agave qu’un ami m’avait offert et qui me semblait-il était mal en point. J’apparaissais également sur la photographie. Je n’avais pas choisi cette image au hasard.
Je lui envoyais une autre photo, celle de mon balcon, afin qu’il puisse voir le nombre de pots que je possédais, leur taille et leur forme.

Mon jardinier inconnu me répondit le lendemain, me disant qu’il avait tout de l’homme des bois, étant à ses heures braconnier, toutefois moins dans la nature que sous l’eau bleue de la Bretagne, ajouta t’il. Il se qualifia de force de la nature,  aimant le parfum fort et puissant des ormeaux. Il me demanda si l’homme des bois était le fantasme des femmes d’écriture. Je compris alors que cet inconnu savait de moi plus de choses que je ne le supposais.

Sunday, July 01, 2012

Au fond du jardin (partie 1)


J’ai reçu un matin un courriel qui disait « Madame, suite à votre annonce, je vous propose mes services pour l'entretien de votre jardin. Je suis travailleur, mes mains calleuses peuvent en témoigner. Dans l’espoir de vous lire, je vous adresse mes sincères salutations. »

J’attendais en effet depuis plusieurs jours qu’un jardinier soit intéressé par mon annonce pour entretenir le jardin de ma maison de campagne et le balcon du premier étage que je ne savais comment aménager. Sa réponse était pour le moins atypique mais piqua ma curiosité. Je fixais rendez vous à ce jardinier pour lui faire visiter les lieux. Celui-ci me répondit qu’il ne pouvait pas venir pour le moment et qu’une simple photo du jardin suffirait pour qu’il me donne un premier avis et une estimation du travail. Je fus surprise de sa réponse mais lui envoyais tout de même les seules photos que je possédais. Une photo montrait le jardin laissé à l’abandon, après quelques essais malheureux de la piteuse paysagiste que je suis. Un jardin bordé d’arbres, un grand pin sur la gauche, des rodhodendrons sur la droite, des massifs d’hortensias et quelques bambous. Je lui décrivis la glycine qui jouxtait la maison. J’eus une réponse le soir même. Il trouvait que ma maison et mon jardin avaient des allures de la demeure d’une Lady Chatterley.
Cette allusion m’amusa.

C’était l’été. J’étais seule dans cette maison en Bretagne pendant quelques semaines et il me plaisait de rêver à cet inconnu qui m’écrivait. 

Saturday, June 30, 2012


Entretien avec Ann Aroïs

Suite à la mise en ligne du petit texte intitulé "Inviter les hommes dans mon boudoir", j'ai reçu une demande d'interview. Je la retranscris ici.

M. S : Depuis quand tenez vous votre blog ?
Ann Aroïs : J'ai ouvert ce blog en 2005.

M.S. :  Pourquoi avoir choisi ce mode de diffusion ? N'avez vous jamais envisagé de publier vos textes par le biais d'un éditeur ?
Ann Aroïs : J'avais écrit quelques textes pornographiques et j'avais envie de les partager. Etre éditée me semblait alors être une chose inaccessible. Ce nouveau média était un moyen simple et j'avais envie de créer un univers à mon image, un habillage autour de mes textes qui corresponde à ce que je suis. Après mon passage sur France Inter, mes lecteurs ont été de plus en plus nombreux. Il m'a été proposé de publier mes textes. Pour le moment, j'aime rester dans cette formule "blog". Il me permet de garder un anonymat et j'aime l'idée que des lecteurs viennent ici par hasard et s'attardent ou pas, lisent quelques lignes et s'en vont, ou restent un peu plus. J'aime l'idée que des lecteurs viennent voir régulièrement si je mets de nouveaux textes en ligne.

M. S. : Vous décrivez vous comme une "sex-bloggueuse" ?
Ann Aroïs :  Non. Je conçois l'activité de mon blog comme le partage d'un univers littéraire et intime. J'écris des textes dont la construction littéraire est très importante pour moi. J'ai envie que le lecteur considère mon texte comme quelque chose de littéraire et en même temps d'excitant parce que pornographique et non érotique.

M.S. : Comment décrivez vous votre "activité" de bloggueuse ?
Ann Aroïs : Comme le partage d'un univers féminin, une écriture féminine du sexe. Mes textes sont pour la plupart autobiographiques. Ils sont une manière pour moi de montrer comment en tant que femme j'aime vivre le sexe.

M.S. : Savez vous qui vous lit, et pourquoi à votre avis ?
Ann Aroïs : Je suis essentiellement lue par des hommes, au vue des mails que je reçois. Ce qui m'a beaucoup surpris, c'est la façon dont les hommes m'écrivent... sur la pointe des pieds... ils n'osent pas... sont très réservés, me font part de leur excitation. Je n'ai jamais eu de mail vulgaire ou grossier mais au contraire très respectueux. Je sais que j'ai des lecteurs très fidèles, qui me suivent depuis le début ou presque. Certains s'inquiètent lorsque je suis dans des périodes longues sans écriture. Plusieurs lecteurs m'ont demandé de correspondre avec eux comme je l'ai fait avec ce lecteur appelé "Jacob" et dont j'ai publié, avec son accord, notre correspondance érotique.
D'autres me demandent de réitérer avec eux l'expérience du "téléphone rose".

M.S. : Vous répondez positivement ?
Ann Aroïs : Non. Car j'aime garder à cette expérience son caractère exceptionnel. Mais je suis toujours très touchée de recevoir des lettres de mes lecteurs.

M.S. : Jamais de lectrices ?
Ann Aroïs : Je n'ai reçu en effet jusque là que des lettres d'hommes.

M.S. : Que recherchent vos lecteurs ?
Ann Aroïs : Je ne sais pas ce qu'ils recherchent au départ mais ils me disent trouver un univers qui les excite. J'ai des lecteurs de tous âges. Les plus jeunes ont 25 ans, ils m'écrivent qu'ils trouvent dans le blog le fantasme d'une femme mûre et classieuse mais crue. Certains hommes m'envoient aussi des textes.

M.S. : Vous demandent ils votre âge ?
Ann Aroïs : Non. Et de toutes façons, je garde le mystère sur ce que je suis et qui je suis, d'autant que je fais un métier public...

M.S : Voici une révélation...
Ann Aroïs : Si peu...

M. S. : Pourquoi parlez vous de "boudoir" ?
Ann Aroïs : Parce que j'aime l'idée du "secret". J'aime que ce blog soit un peu mystérieux. Ann Aroïs n'est pas mon vrai nom. J'aime que l'on vienne lire mes textes comme on regarderait une scène érotique par le trou d'une serrure. J'ai envie que mes lecteurs ouvrent la porte de ce blog comme s'ils entraient dans un boudoir pour prendre du plaisir dans des draps froissés. Je souhaite que les mots que j'écris excitent les lecteurs, suscitent le désir. J'aime qu'ils entrent dans un univers qui est le mien. C'est aussi pour cela que j'habille ce blog de photographies anciennes qui laissent entrevoir des corps sans les dévoiler tout à fait, et qui évoquent aussi l'époque des boudoirs. J'aime l'ambiance des maisons closes du XIXe siècle.

M. S. : Comment comprenez vous l'engouement que rencontre votre blog ?
Ann Aroïs : Il est très prétentieux de répondre à cette question... J'espère que c'est parce qu'il est différent. Que l'habillage du blog semble d'une autre époque mais que les textes sont totalement défaits de tabous.

M. S : Vous avez en effet publié des textes très crus. Je pense notamment au "Journal pornographique". Certains de vos derniers textes ont une syntaxe plus poétique, plus courte.
Ann Aroïs :  J'aime les deux façons d'écrire.

M.S. : Vous lisez beaucoup de littérature érotique ?
Ann Aroïs : Jamais. Je n'aime pas vraiment ce genre littéraire. Seule Anaïs Nin fait exception à mes yeux. Je n'aime pas l'écriture érotique au sens où on la lit le plus souvent : je n'aime pas les descriptions langoureuses des corps, des ambiances. Cela m'ennuie le plus souvent. J'aime que les mots soient tout de suite ceux du désir, du plaisir.  J'aime les mots crus. Je n'aime pas l'érotisme, j'aime la pornographie. J'aime les mots du sexe, mais j'aime les trouver là où on ne les attend pas. J'aime le sexe chez Hervé Guibert, chez Guillaume Dustan, chez Duras aussi, chez Grisélidis Réal.

M. S. : Et chez Choderlos de Laclos ?
Ann Aroïs : Bien sur ! "Les liaisons dangereuses" reste mon livre de chevet. Et le film mon film préféré. J'y aime le secret, le sulfureux, sa forme de perversité, mais sa grande qualité littéraire.
Sans compter que c'est une époque que j'aime beaucoup.

M.S. : Avez vous un rêve secret ?
Ann Aroïs : Enregistrer de façon audio certains textes et les mettre en ligne et enregistrer de façon audio "La correspondance érotique" entre Jacob et moi.

M.S : Et une publication "traditionnelle" ?...
Ann Aroïs : L'année prochaine peut être...

M.S. A suivre alors...

Le 25 mai 2012.




Tuesday, June 26, 2012

Seule le soir contre vous


Vous êtes sous le soleil.
Je suis toujours sous la pluie.
Le déluge même.
Je travaille beaucoup.
Et puis ce soir comme de nombreux soirs, je dis "non, dès la semaine prochaine, je dois moins travailler".
Ces soirs là, je prends soin de moi.
Je prends du temps pour moi.
Je prends du temps dans ma salle de bains.
Je prends plaisir à mettre de nouveaux draps dans mon lit.
J'écoute Radio Classique. Je lis.
Je loue un film. Un film qui parle de famille, d'amour, de rupture, de désir.
Et puis dans la pénombre de la nuit qui commence, nue dans les draps, je me caresse.
Je me fais jouir en rêvant à des amants doux, sensuels et remplis de désir.
Je laisse la fenêtre entrouverte.
En espérant que personne n'entende mes gémissements de plaisir.
Et puis je reste ainsi dans les draps frais, le vent frais de la nuit qui glisse dans l'entrebâillement de la fenêtre ouverte.
Si je ne dors pas, j'écoute des émissions enregistrées à France Culture.
Des émissions où des femmes à la voix douce comme celle de Françoise Lebrun me détendent.
Et je m'endors
Lovée dans des bras imaginaires.
Vous êtes dans votre lit.
Je ne sais pas si vous pensez à moi.
Je pense à vous.
Dans des draps loin de vous.

Tuesday, May 08, 2012

Tuesday, May 01, 2012

Sunday, April 29, 2012

La seule chose qui compte (texte de Ann Aroïs)


Une musique. Delon sous un soleil bleu italien sortant une anguille de l’eau. La femme qui s’allonge nue sur le ventre contre le sable. Delon qui prend l’anguille et la frappe violemment contre le rocher, une main gantée de cuir.
La femme qui regarde la mise à mort.
La force. La puissance. La virilité.
La femme nue, le désir.
La jambe qui semble signifier l’envie du désir.
Delon qui s’allonge sur elle.
La musique.
Et le soleil brulant.

La scène absolue du désir.

J’ai revu cette scène deux jours après sa venue.

Le souvenir du désir ressenti.
Sentir la force de son corps contre le mien.
Le lit.
Lui contre moi.
Sa main ouvrant les lèvres de mon sexe.
Sa main large. Ses doigts qui me branlent.
Mes gémissements.
Sentir son corps qui se colle plus fortement contre moi.
Le début de la jouissance parce que je ressens cette force.
Les mots que je lui dis.
Soulage moi. Suppliante.
Rentre un doigt. Langoureuse.
Me sentir prise.
Ses doigts qui s’enfoncent.
Son corps qui s’appuie encore plus fortement.
Sa bouche contre la mienne.
Ses mots.
Salope.
Les miens.
Dis le encore.
Salope.
Encore.
Ses doigts qui me font jouir.
Mouiller de plus en plus.
Détendre de plus en plus mon corps.
Tandis que son corps devient de plus en plus fort.
Me sentir prise.

Se sentir prise contre le corps de l’autre qui s’appuie de plus en plus. Le besoin de sentir la force qu’il mettra dans sa queue.

Juste le désir.
Juste ressentir le désir.

La force du désir.
La seule chose qui compte.

Saturday, April 14, 2012

Inviter les hommes dans mon boudoir

Il y aurait une écriture du non-écrit. Un jour ça arrivera. Une écriture brève, sans grammaire, une écriture de mots seuls. Des mots sans grammaire de soutien. Égarés. Là, écrits. Et quittés aussitôt.

Marguerite Duras


« L’homme jouit du bonheur qu’il ressent, et la femme de celui qu’elle procure. Le plaisir de l’un est de satisfaire des désirs, celui de l’autre est surtout de les faire naître. »

Pierre Choderlos de Laclos


Il m’a souvent été demandé pourquoi j’écrivais et pourquoi je ne publiais pas. Attendu que la publication ne se fait pas par simple volonté personnelle, j’ai toujours répondu de la même façon à ces deux questions. Je ne cherche pas à être publiée pour garder le secret de mon boudoir. Cet espace où j’écris et où je publie mes textes pour les seuls lecteurs qui passent ici et qui ont envie de s’attarder est un lieu dont j’aime la lumière tamisée. J’écris des mots et des phrases qui m’excitent et me donnent envie de jouir mais j’écris des mots et des phrases pour exciter ceux qui me lisent, leur donner envie de jouir.

Cet échange avec eux est une relation secrète intime.

J’invite des hommes dans mon boudoir pour susciter leur désir.


Je ne connais pas mes lecteurs. Mes lecteurs ne me connaissent pas. J’invite des hommes dans mon boudoir des mots. Je dis des hommes car je ne sais pas si des femmes me lisent. Des hommes me lisent. M’écrivent aussi. Comme les images qui habillent cet espace, je ne découvre rien ou peu, mais je veux que les mots soient crus, soient ceux du sexe et du plaisir.

Des mots posés là, comme des gouttes de sperme sur la peau, des phrases qui glissent comme des doigts entre des lèvres humides. Des horizons qui s’ouvrent comme des lèvres qui appellent à jouir.

J’invite des hommes à jouir avec moi par l’intermédiaire des mots.


J’ai envie de montrer aux hommes une intimité de femme comme si chacun d’eux regardaient par le trou d’une serrure une femme jouir en secret. Derrière les corsets et les dentelles des images se font et se défont des cris de plaisir.

J’aime imaginer qu’un homme bande en lisant mes textes.

J’invite des hommes à me lire pour qu’ils bandent avec mes mots.


Je suis la pute des mots de la côte normande.