Tu me donnes beaucoup
l’envie d’aimer.
extrait de
« Hiroshima, mon amour » / Marguerite Duras
C’est ça l’écriture. C’est
le train de l’écrit qui passe par votre corps. Le traverse. C’est de là qu’on
part pour parler de ces émotions difficiles à dire, si étrangères et qui
néanmoins, tout à coup, s’emparent de vous.
extrait de « Ecrire » /
Marguerite Duras
C’était à Versailles d’abord
Après Rameau
A l’Opéra Royal
C’était
Dans un décor de feutre rouge
Sous le doux miroitement des
lustres
Un dîner
Sous la verrière 1900
De la Grande Cascade
Elle parle.
Doucement.
Il la regarde.
Sourit aussi.
Un sourire doux.
Il pose son regard dans ses yeux.
Verts.
Elle est elle.
Comme toujours avec lui.
Il reste silencieux.
Elle est gênée par son silence.
Il regarde ses yeux.
Il touche sa main.
Elle ne dit plus rien.
Elle glisse lentement sa main.
Il la retient.
Doucement.
Elle sent la chaleur de sa main
sur la sienne.
Il dit tout bas et lentement
J’ai envie de vous.
Elle dit tremblante
Non.
Il dit
J’ai envie de toi.
Il ne l’a jamais tutoyé.
Il n’a pas le droit de la tutoyer.
C’est la règle.
Il caresse sa main.
Elle sent son cœur trembler.
Elle sent les larmes couler
Doucement
Sur ses joues.
Il essuie avec ses doigts les
larmes.
Doucement.
Il dit
Pourquoi ?
Elle regarde ses yeux
Elle dit
Mon corps est si abîmé.
Il dit simplement et doucement
Non.
Elle répète
Mon corps est si abîmé.
Il sèche la larme qui coule.
Il dit que son corps est elle
Et qu’elle, elle est belle.
Il dit qu’il a envie d’elle.
Elle dit
Tu ne connais rien de mon corps.
Il dit
Je connais mieux que quiconque
l’histoire de ton corps.
Elle sait.
Parce qu’elle lui a tout montré
d’elle
Pendant ces années
Il l’a vue souffrir de ce corps
Il l’a vue retrouver le sourire à
chaque petite victoire
Il dit
Je veux te voir jouir
Je veux jouir avec toi
Elle dit
Je ne montrerai jamais ce corps.
Après un tout petit silence, il
parle.
Ce corps est ton histoire.
Il est toi et c’est de toi dont
j’ai envie.
Pourquoi ?
Dit elle.
Parce que c’est toi.
Parce que j’ai eu envie de toi
presque à chaque fois
Même si je n’en avais pas le
droit.
Cette fois c’est moi qui s’ouvre à
toi.
Je ne pourrais pas.
Avec toi.
Ni avec aucun autre.
C’est avec moi que tu le pourras.
Pas parce que c’est moi ou que
c’est toi.
Simplement parce que j’ai envie de
toi
Pour ce que tu es toi
Ton corps et toi
Laisse moi être dans toi
Moi qui connais tout de toi
Laisse moi te montrer qui tu es
toi
Je ne suis ni Jung, ni Allendy,
Tu n’es ni Sabina Spielfrein, ni
Anaïs Nin
Je suis moi
Tu es toi
Et parce que maintenant tu es
encore plus toi
Alors je peux être vraiment moi
Et te redire combien j’ai envie de
toi.
Ton corps n’est pas abîmé
Il est l’abîme d’une histoire
Mais il n’a rien enlevé de ta
beauté
Ni de ce que tu es.
Dans l’abîme sans fond mon regard
a plongé
A écrit Lamartine
Laisse moi écrire sur ta peau
Les baisers du plaisir
Pour que jamais ne s’abîme
Ce que tu suscites en moi
Le bonheur de t’aimer et de te
désirer.
2 comments:
Ce texte est magnifique
et très profond.
Il s'adresse à tous ceux qui aiment
Vraiment.
Quand on ne se trouve pas désirable, on ne peut s'enflammer du désir d'autrui qu'à condition d'accorder davantage de valeur au jugement d'autrui qu'au sien propre.
Retrouver le désir, lorsqu'on ne se plaît pas, est long, et difficile.
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