Avaler ce qui sort de sa bouche
Le romancier donne à voir par le trou de la serrure ce qu'on ne pourrait pas voir autrement.
Alberto Moravia
Pour écrire, il faut aimer, et pour aimer, il faut comprendre.
John Fante
Il sort de jolis mots de sa bouche. Il dit «con» pour «chatte». Il dit «tribade», «étrite», il dit «en commerce avec», il dit «ma douce», «chère Princesse», il dit «c’est admirable»., «vous êtes formidable», «quel tempérament», il dit «mamourer», «galocher», «patiner», il parle de «salope suprême», de «félicité». Elle avale tous ses mots qui sortent de sa bouche comme de douces sucreries au goût de chocolat, à l’odeur de caramel. Elle suce ses mots longuement.
Lui imagine. Il sort de sa bouche sa langue pour sucer le bonbon qu’elle lui donne en ouvrant son autre bouche. Il goûte le miel qu’elle laisse couler d’elle.
Elle ferme les yeux. Elle aime mélanger sa bouche à la sienne et avaler sa salive.
Il aime entendre sa voix. Il aime les cris qui sortent de sa bouche. Les cris de plaisir. Les cris de cristal. Des cris de jouissance qui résonnent à son oreille.
Il aime la lumière de l’imaginaire et l’ombre du secret. Il aime rêver aux mots qui sortent de sa bouche.
Lui et elle écrivent. Ils ne se connaissent pas, ne s’aiment pas, mais ils se nourrissent de ce qui sort de leur bouche, des mots qu’ils disent, pour mieux goûter le jour venu le plaisir qui viendra couler dans leur gorge.
2 comments:
Magnifique. C'est un de tes meilleurs textes.
Très jolie! I like the last paragraph the best!
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