Friday, June 25, 2010

Extrait

"Votre dernier récit m'a complètement fait fantasmer, lui avoua t'il quelques jours plus tard.
- à cause de ma violence ?
- pas seulement. Je vous ai trouvée vraiment gonflée d'oser dire à un homme que vous connaissez à peine que vous aviez envie de lui. J'adorerais qu'une fille me fasse cela.
- vous n'êtes pas le seul, mais il y en a aussi qui détestent. Un jour, l'un d'eux m'a lancé, très déçu : "mais enfin, si vous cédez tout de suite, s'il n'y a pas le plaisir de la conquête, où est le plaisir ?"
- que lui avez vous répondu ?
- je lui ais susurré avec une voix d'hôtesse de l'air : "le plaisir ? mais dans le plaisir, tout simplement. Le fait que je vous dise "oui" ne suffit pas à vous consacrer bon amant". Moyennant quoi j'ai eu droit à un catalogue exhaustif des caresses, préliminaires et gâteries censés faire chavirer les dames. Le malheureux avait dû lire tous les manuels de sexologie du monde, il s'est appliqué comme un élève passant le grand oral de l'Ena... mais aussi peu excitant ! J'en garde un souvenir amusé, mais pas une once d'émotion.
- comment font ils ceux qui vous émeuvent ?"
Au moment où il prononça cette phrase, David fut surpris de sentir son coeur battre très fort. Ce trouble avait quelque chose d'incongru, pour une question si banale. Il posa la main entre ses cuisses. Il bandait, et il sut que, depuis le premier jour, toutes leurs conversations convergeraient vers cette question. Il se demande si Elle allait lui répondre. Si Elle y consentait, il aurait l'impression de pousser la porte d'un château-fort et de découvrir, derrière les murs apparemment inébranlables, la fragilité des herbes légères poussant entre les pierres.
Elle se souvint d'un après-midi d'été dans une chambre d'hôtel. Depuis plusieurs semaines, elle rencontrait un homme qui lui plaisait, et tous deux parlaient, se regardaient, s'effleuraient parfois du bout des doigts et des lèvres, sans rien de plus. Elle murmura un jour à son oreille : "J'ai envie de vous"". Il la serra contre lui, glissa : "Moi aussi, j'ai envie", et puis ce fut tout. Elle était boulversée de sa réserve, de cette distance qu'Elle ne comprenait pas puisqu'il savait qu'Elle le désirait. Elle résolut de brusquer les choses, non pas pour le brusquer, mais pour se délivrer de son désarroi.
(...)
Elle lui livra sans hésiter son visage enfoui dans l'oreiller, ses doigts crispés sur le drap, ses cuisses écartées et ses fesses sans défense, son total abandon. Elle sentit une main passer sous son ventre, l'autre glisser entre ses cuisses et toutes deux se rencontrer après un savant cheminement au plus profond d'Elle-même. Lorsqu'enfin il la pénétra, Elle jouissait d'un désir de lui si dévastateur qu'il lui sembla ce jour-là faire l'amour pour la première fois.

1 comment:

Christian CAZALS said...

Très beau texte qui me fait vibrer.